Si en vertu de l’article 815-17 du Code civil, les créanciers personnels d’un indivisaire ne peuvent saisir sa part dans les biens indivis, ils ont la faculté de provoquer le partage au nom de leur débiteur.
Toutefois, la jurisprudence est venue déroger au régime légal de l’indivision dans certains cas et notamment lorsque l’indivision est forcée et perpétuelle.
En effet, les règles de droit commun de l’indivision tel que le partage, sont écartées lorsqu’elles portent atteinte à la destination et à l’usage collectif auquel l’indivision est affectée.
Il y a indivision forcée et perpétuelle lorsque des biens à raison d’un état de fait ou par l’effet d’une convention sont affectées à titre accessoire indispensable à l’usage commun de deux ou plusieurs immeubles appartenant à des propriétaires différents.
Il s’agit de droits indivis accessoires au fond auquel ils sont affectés et ils ne peuvent en être dissociés ni cédés indépendamment. Cette situation va concerner principalement des chemins d’accès, cours, passages, voies de lotissement, canalisations, caves communes et canaux servant à plusieurs propriétaires différents.
Pour le créancier poursuivant, en matière de saisie immobilière, se pose régulièrement la question de la faculté de saisir en plus de l’immeuble bâti, les droits indivis du débiteur sur le chemin d’accès à l’immeuble.
En effet, en raison du régime légal de l’indivision, en principe ces droits indivis ne peuvent être saisis.
Cela pose une difficulté en pratique dès lors que le créancier poursuivant ne peut saisir qu’un immeuble enclavé et donc difficilement vendable.
Néanmoins, en fonction de la situation, ces droits indivis peuvent constituer une indivision forcée et perpétuelle. Ils peuvent être saisis en même temps que l’immeuble auquel ils sont affectés.
C’est ce que la Cour d’appel de Pau dans un arrêt rendu le 12 janvier 2021 par la première chambre RG 19/01683 a rappelé.
La Cour a infirmé le jugement du juge de l’exécution qui avait considéré que les droits indivis de la débitrice sur un chemin d’accès à l’immeuble ne pouvaient faire l’objet d’une saisie. Statuant de nouveau, elle a donc déclaré la saisie de ces droits indivis régulière dès lors que l’indivision qui affecte cette parcelle constitue une indivision forcée et perpétuelle dont la nature exclut l’application du droit commun de l’indivision et notamment les dispositions de l’article 815-17 du Code civil.
Il appartiendra donc au praticien d’analyser en détail la situation de ces droits indivis car la qualification d’indivision forcée et perpétuelle relève d’une appréciation souveraine des juges du fond et pourra donc faire l’objet de contestations à l’occasion de la procédure de saisie immobilière.
P.BARROUX
Avocat associé